Le débat autour du rapatriement des familles de djihadistes est devenu un sujet récurrent dans la politique française de ces trois dernières années. À chaque nouvel acte, une nouvelle polémique. La première remonte à février 2019. À un journaliste de l’AFP qui s’est rendu dans un camp de prisonniers syriens, une femme lance : « Mon fils grandira un jour et deviendra djihadiste ». Tollé à droite, les plateaux de télévision s’animent : faut-il sacrifier des Français à l’allégeance douteuse pour le bien de la sécurité nationale ?
Originaires du camp d’Al Hol, ces 55 membres de familles de djihadiste ont vécu un retour mouvementé. Arrivés à 4h du matin ce jeudi 20 octobre sur le sol français, toutes les femmes ont été présentées à la DGSI ou à un juge dès leur arrivée. Les enfants, eux, seront vite remis à des familles d’accueil. Les plus jeunes ont trois ans, les plus âgés sont désormais adolescents.
Une pression juridique de la CEDH
Pourtant, cette décision est peut-être motivée par des raisons assez pragmatiques. En effet, le 14 septembre dernier, la Défenseure des droits Claire Hédon, de la CEDH, avait condamné la France à rapatrier les familles de djihadistes détenues dans des camps en Syrie dans les prochaines semaines.
À l’origine de cette condamnation, on retrouve la plainte de deux couples qui avaient demandé le retour de leurs familles, sans succès : le Conseil d’État avait rejeté leur demande. Mais ne lâchant pas l’affaire, ils sont allés la porter devant la CEDH qui leur a donné raison, invoquant le droit des enfants alors que la malnutrition et de pénibles conditions de détention règnent dans ces camps.
Cependant, ces rapatriements humanitaires soulèvent a priori quelques problèmes. Le premier d’entre eux est sans nul doute celui des enfants qui n’y ont commis aucun crime, mais qui ont subi le sévère endoctrinement qui régnait dans les camps de Daech. De quoi les qualifier de potentielles « bombes à retardement » selon le procureur de la République de Paris François Molins. Du côté des femmes de djihadistes, leur jugement se fera au cas par cas pour leur éventuelle complicité terroriste. Selon Laurent Nunez, ce seraient encore 300 personnes qui vivraient aujourd’hui dans ces camps, surveillés par les troupes du président syrien Bachar El-Assad.