« Déconstruire les clichés ». Quel meilleur adjectif pour qualifier France Culture aujourd’hui ? Tout le monde a déjà allumé l’autoradio et est tombé sur une émission de cette petite niche historique au sein du conglomérat Radio France.
L’empire, pour rappel, a un budget annuel de 623 millions d’euros en employant 5000 personnes. Dans cet argent, 570 millions d’euros de redevance, et 92 millions de recettes. Un budget conséquent, pour des résultats souvent jugés médiocres. France Culture et sa mission de service public n’y échappe d’ailleurs pas.
Un progressisme systémique
Que le service public ne soit pas ancré politiquement à droite, personne n’en doutait. Mais à la gauche de France Info, puis de France Inter, il y a France Culture. Et pourtant, la radio ne respecte même pas la parité dans ses choix de portraits…majoritairement féminins. Quitte parfois à devoir faire des compromissions, comme lors d’une vidéo de trois minutes, complaisante envers Germaine Berton, meurtrière du cadre de l’Action Française Marius Plateau. Titrée : « la jeune inconnue qui a vengé Jaurès », l’extrait laisse peu de place à la critique d’une femme « qui ira même jusqu’à tuer pour ses idées ».
Plus actuel : l’article élogieux écrit à l’occasion de la démission de la très-progressiste Jacinda Adern, la Première Ministre de Nouvelle-Zélande. On y lit l’importance de la « Jacindamania », alors qu’en interne comme dans les médias conservateurs du monde entier, la dirigeante était régulièrement la cible de nombreuses critiques.
On y lira aussi l’histoire de « Suzanne Noël, pionnière féministe de la chirurgie esthétique », ou celle de Françoise Giroud, « une des plus grandes journalistes de notre temps ». Jamais dans la mesure lorsqu’il s’agit de louer l’œuvre d’une femme (de gauche si possible), un entretien sur l’inclusivité à l’Académie des Beaux-Arts est également assez édifiant : l’on s’y réjouit que les femmes soient en plus grand nombre, parce que ce sont des femmes. « C’est la société qui se métamorphose […] Et ce serait quand même fou que l’Académie ne suive pas ». Alors, allons-y, suivons la société : « il y avait trois femmes avec nous, c’était bien mais absolument pas suffisant ». Si l’objectif n’est pas la parité, il reste tout de même la quantité. De la comptabilité s’ensuit alors, sur l’évolution du nombre de femmes : « il faut faire effectivement extrêmement attention à avoir une proportion quasi équivalente ».
Néo-féminisme : mode d’emploi
Évidemment, on retrouve nombre de fantasmes néo-féministes, loin des vieux combats de la parité. Le 22 janvier, c’est Hakchenda Khun, dite Aurélia Aurita, une dessinatrice de BD érotiques ayant un « discours féministe » présentant son ouvrage à l’évocateur titre : Fraise et chocolat. Parler de sexe sans cesse et de façon très explicite, c’est ainsi souvent une marque de fabrique des bourgeoises féministes. La BD sera d’ailleurs décrite comme « exhibitionniste », mais pas sur France Culture.
De nouvelles « problématiques » sont aussi étudiées, comme Vienne, ce modèle de « ville inclusive » rendu possible grâce à un « groupement de paysagistes féministes ». Une série « sur le concept de genre et sa dissémination inflammable en France : retour sur l’émergence d’une nouvelle façon de voir le monde, loin des clichés, des procès en sorcellerie et des approximations », voit également le jour. On y comprendra par exemple que « le genre […] n’est pas une théorie ». Véritable logorrhée « culturelle », l’idée est qu’il faut éduquer le peuple qui a mal compris l’importance de cet « enjeu féministe ». D’autant que « souvent, elle se combine à la classe et à la race dans des travaux intersectionnels ». Si c’est le cas, alors… Évoquons bien sûr sur l’émission « Sexisme et langage : l’écriture inclusive redonne au féminin la place qu’il mérite » qui se passe de commentaire.
Embrasser l’intersectionnalité
Évidemment, on ne peut plus être de gauche sans épouser l’ensemble des luttes dites « intersectionnelles ». Parmi elles, le rejet de la tradition. On trouve alors sans peine la série « Transmission », qui traite notamment des problèmes de l’héritage : « Hériter, c’est un truc de riches ! » lâchera Mathilde. Stéphane, de son côté, est extrêmement représentatif des Français, de par son statut de victime d’inceste. Tout ça pour saper la transmission : la fessée devient une « violence tolérée » au cours d’une émission qui rappelle qu’« intimider un enfant n’est pas un moyen de lui apprendre la frustration et l’art de grandir ». La faute à qui ? Aux catholiques, bien entendu. Et même aux papes d’ailleurs. Au lieu de ça, riche idée de suivre les artisans de la destruction du modèle éducatif français.
La représentation des minorités n’est pas à mettre de côté. De façon croustillante, on pourra conter l’histoire de Zamor, un esclave bengalais encensé par France Culture pour avoir tué sa maîtresse, la comtesse du Barry. L’analogie avec la société actuelle est intéressante : ce sous-citoyen a été éduqué par sa supérieure, avant de l’envoyer sur l’échafaud.
Dans la même veine, le film Tirailleurs, descendu par les spectateurs, est largement valorisé pour ses vertus « pédagogiques ». En effet, selon France Culture, les Français sont tellement racistes qu’ils n’avaient jamais entendu parler des tirailleurs sénégalais. En place, dernier film de Jean-Pascal Zadi pose la question suivante : la France est-elle prête à avoir un président noir ? Décrit comme d’un « comique efficace », la radio vante sa prise en compte des problématiques de gauche, et que de gauche.
La radio de la culture, la vraie
La culture générale, France Culture en parle, et bien. Lorsqu’il s’agit d’un sondage concernant le rôle de culture générale et son état en France, leur perspicacité légendaire leur permet de mettre immédiatement le doigt sur le problème. Ce n’est pas que les jeunes sont moins cultivés qu’avant, non. En fait : « 61% des moins de 25 ans ont déjà ressenti un manque de culture générale dans le cadre professionnel. Cela m’a paru vraiment énorme ! Alors que la totalité des Français, c’est 37%. Les jeunes ne sont pas du tout dans la revendication de leurs savoirs, dans l’arrogance. »
Le problème d’aujourd’hui, c’est donc le manque de confiance en eux des jeunes. On peut d’ailleurs élargir ce constat à l’ensemble de la société française : « Je ne sais même pas si c’est de la modestie ». De l’art de se poser les bonnes questions.
Relativistes sur l’orthographe lorsqu’il s’agit de parler de la dictée, et cléments envers les censeurs du XXIe siècle, ils sont pudiquement appelés : « sensitive readers » -car l’anglicisme est un enrichissement, sans doute. Ces « démineurs littéraires » ont pour objectif de retirer tous les contenus « offensants » pour « tuer la polémique dans l’œuf ».
Que dire de plus, sinon résumer la constante chute du niveau de France Culture par ce titre merveilleux : « De Proust aux éditions Harlequin : et vous, que lisez-vous aux toilettes ? ».