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[Editorial] Nouvelle-Calédonie : gouverner, c’est prévoir…

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Mais pourquoi avoir décidé de présenter le projet de loi constitutionnelle élargissant le corps électoral en Nouvelle-Calédonie à deux mois de l’ouverture des Jeux Olympiques ? Vous me direz quel rapport existe-t-il entre les deux ? Sur le papier aucun. En réalité, les dégradations que vient de connaître le « caillou » ont atteint un montant de 700 millions d’euros, soit presque équivalent à celui des émeutes de juillet dernier en métropole. Pour une population de 270 000 habitants seulement répartis sur un territoire de 18 000 kilomètres carrés situé aux antipodes du pays, c’est assez réussi. C’est surtout une nouvelle illustration fâcheuse que depuis le commencement de l’ère Macron, le dialogue entre le peuple français dans toutes ses composantes et son gouvernement se termine souvent dans la violence : Gilets Jaunes, réforme des retraites, banlieues ou encore crise du monde agricole…

Quand on pense que le gouvernement a tout fait ici en France pour acheter la paix sociale, qu’il entend à l’approche des JO que l’ordre règne, et que pour ça, il prévoit même de déplacer dans la capitale et les lieux où se déroulent les épreuves des forces de police jusque depuis le Sud de la France, qu’il accorde prime sur prime aux salariés des transports devant la moindre menace de grève, voilà qu’une bande d’indépendantistes kanakes décide de tout brûler dans un coin perdu de France au milieu du Pacifique. Gouverner c’est prévoir, disait le général de Gaulle, qui au passage n’aimait pas beaucoup la Nouvelle-Calédonie. Il disait même à son sujet : « La Nouvelle-Calédonie, c’est simple, je vais vous expliquer : c’est une bande de terre peuplée par une bande de cons »…

Dans cette paix promise aux Français et au monde olympique, la Nouvelle Calédonie est plus qu’un caillou dans la chaussure de Gérald Darmanin. Car ce dernier savait très bien que son projet de réforme constitutionnelle pouvait servir d’allumette sur un baril de poudre kanake déjà très échauffé. Et lorsque le ministre dénonce les ingérences étrangères, en particulier l’Azerbaïdjan, dans la crise calédonienne, c’est d’abord une manière d’esquiver ses propres responsabilités. Ne jamais oublier que lors de nos mésaventures coloniales en Indochine et en Algérie, on accusait déjà l’URSS et la Chine de soutenir les insurgés. C’était la vérité, mais le fond du problème n’avait pas été créé par ces puissances hostiles mais bien par nous-mêmes, nous Français. De même qu’aujourd’hui, nos déboires en Afrique de l’Ouest n’ont pas pour origine la milice Wagner comme on l’entend trop souvent. Celle-ci, les Russes, les Chinois ou les Turques, ne font que profiter de nos échecs. Il est toujours commode d’accuser les autres…

Pour la Nouvelle-Calédonie, il en va de même. Que Bakou, situé à 14 000 kilomètres de Nouméa, s’intéresse à la « bande de terre » du général, ce n’est pas par pure altruisme ou encore par soucis du devenir des peuples autochtones dans le monde. C’est parce que dans le combat antédiluvien que les Azerbaïdjanais mènent contre les Arméniens, nous avons l’inconvénient d’armer et de former ces derniers. L’Azerbaïdjan a donc trouvé le moyen idéal de nous gêner le plus possible. Les contacts entre Bakou et les indépendantistes kanakes, comme avec ceux de tous nos territoires d’outre-mer, ne sont pas nouveaux. Comme ne l’est pas non plus l’hostilité affichée devant notre présence dans ce coin de terre de l’Australie, la Chine, la Nouvelle-Zélande et même des États-Unis d’Amérique, fidèles en cela à l’adage de feu Henry Kissinger qui veut que l’Amérique n’ait pas « d’ennemis ou d’amis, seulement des intérêts ». Tout cela était donc prévisible. Or le gouvernement ne l’a pas vu, concentré sans doute sur sa trêve olympique. Les Kanakes en ont profité pour rappeler au monde leur existence et les menaces qui pèsent sur elle, pour le plus grand plaisir de tous ceux qui entourent le « caillou » et qui aimeraient bien nous voir déguerpir pour de bon…

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