Discriminé à cause de ses cheveux ? La question semble presque comique. Pourtant, des femmes dénoncent une différence dans la perception de leur professionnalisme vis-à-vis de leurs cheveux. Selon une étude menée par Dove et LinkedIn, deux femmes sur trois changent de coupe de cheveux pour un entretien d’embauche. Parmi ces candidates, toutes Américaines, 41% passent des cheveux bouclés à des cheveux lisses. En France, il n’existe aucune donnée pour connaître la portée de cette discrimination.
Des préjugés persistants sur la texture ou la couleur des cheveux
Sur les réseaux sociaux, certains comptes français dénoncent une différenciation du jugement des employeurs entre des cheveux lisses et des cheveux frisés. Sur son compte Instagram, Kenza Bel Kenadil milite contre la discrimination capillaire dont elle a déjà été victime lors d’entretiens d’embauches. “La dame m’a dit de ne pas venir avec mes cheveux naturels, ça fait sauvage et puis ça fait un peu sale” dénonce la jeune femme dans plusieurs de ses vidéos. De son côté, Danièle Obono, députée de Paris (France insoumise), citait à l’Assemblée nationale, la psychologue Carmen Diop qui a travaillé sur le sujet. Elle prend l’exemple d’une femme noire qui a répondu à son étude : “Je me suis autocensurée, je mettais des perruques, je faisais des tissages”. Des témoignages loin d’être isolés.
Leïla*, la quarantaine et journaliste, témoigne sur les moqueries liées à ses cheveux qu’elle a subis dans son travail. “À la télé, mon rédacteur en chef voulait me mettre sur une émission. Je n’ai pas été sélectionné parce qu’il m’avait demandé de me défriser les cheveux. J’ai refusé et c’est une femme aux cheveux lisses qui a été prise” confie-t-elle. Dépitée, elle n’a rien pu faire et dire. Elle est cependant optimiste face à la proposition de loi : “Pour les futurs enfants, si la loi est votée, ça les incitera moins à défriser ou à lisser leurs cheveux pour le travail et à accepter leur vraie nature”.
Le texte de loi contre les discriminations capillaires concernent également les chauves, les blonds et les roux sont aussi concernés. Souvent associés à des préjugés, ces personnes seraient aussi victimes de discrimination, sans chiffres officiels à l’appui. Une loi en France existe déjà pour combattre tout type de discriminations. Elle date du 16 novembre 2001 et stipule : « Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, […], de leur apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race. »
Une nouvelle loi jugée “inutile”
Selon le député Liot de Guadeloupe, Olivier Serva, “cette loi est mal comprise ou mal appréhendée”. Dans une interview accordée à Ouest-France, il défend son projet qu’il a déposé en mai 2023 : “Parmi les discriminations physiques, la coupe de cheveux est quelque chose d’important. Or cette spécificité est actuellement maltraitée.” Si cette loi est votée par le Sénat, alors des sanctions pénales pourront s’appliquer. Un employeur qui discrimine un candidat pour ses cheveux risquera jusqu’à trois ans de prison et 75 000€ d’amende. Ce texte de loi prendrait la forme d’un article unique visant à insérer des mots dans des articles de loi déjà écrits sur les discriminations. Par exemple, les termes suivants devront être insérés après le mot “physique” : « notamment la coupe, la couleur, la longueur ou la texture de leurs cheveux, ». Le Sénat, majoritairement de droite, ne votera peut-être pas cette proposition. Plusieurs sénateurs l’estiment comme étant “inutiles”.
*Le prénom a été modifié.