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Emmanuel Macron est-il d’extrême droite ?

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De badauds à badauds, le contact est facile. Alors, quand un groupe de chanteurs fraîchement sortis de répétition croisent un promeneur sur le chemin de leur bar favori, près de Saint-Germain-des-Prés sur la rive gauche de Paris, autant chanter ensemble. Problème, quand l’intéressé est Président de la République, même un chant de bergers devient politique. Les instigateurs du moment deviennent de dangereux militants d’ultradroite, une application de chansons populaires devient « l’appli qui fait chanter l’extrême droite », « subventionnée » par un ministère de la Culture quasi collaborationniste et cautionnée par un Emmanuel Macron tout sourire, venu se prouver que toutes les rues de Paris ne lui sont pas hostiles… Loin des émeutes en cours au même moment, rive droite.

Balade du bon côté
Après l’effort, le réconfort. Si possible loin des foules réclamant votre peau. Emmanuel Macron, dont la majorité des promenades de santé parisiennes « fleurent bon » la rive gauche de la capitale, était sans surprise à deux pas de Saint-Germain-des-Prés lors des aménités. La rive droite est boudée par le chef de l’État, et pour cause : au même moment, les casseroles retentissaient place de la République, par exemple, à la suite de son allocution qui, pour 9 Français sur 10, « ne changera rien » voir envenimera (71% des sondés) la situation. 

Avec quelques gardes du corps et son épouse, Emmanuel Macron était descendu discrètement dans les rues de Paris, constater si oui ou non tous les trottoirs de France lui étaient définitivement hostiles. Il semblerait que non, si l’on choisit bien le lieu et l’heure. Contre-exemple : l’Alsace

Pourtant, un cessez-le-feu est possible, parfois. La musique adoucit les mœurs, ce que certaines âmes nocturnes ont compris ce soir-là. Ils chantent avec lui. Mais il aurait dû connaître ces jeunes avant de leur parler, connaître l’application avant d’y chanter son chant préféré, se méfier d’une bande de joyeux lurons qui lui proposent un moment convivial. C’est l’avis d’une bonne partie de la presse française le lendemain, avec en tête de peloton le journal Libération.
Canto, l’appli populaire, donc d’extrême droite
C’est une application mobile issue d’un collectif, le Projet Canto, qui a pour but de « trouver tous les chants populaires et traditionnels de France, pour les sauvegarder en numérique ». Ils se présentent comme « une association loi 1901 qui entend sauvegarder, faire vivre et transmettre la mémoire du chant populaire français grâce à un site et une application gratuite pour servir de support ». De Fanchon à Verdun on ne passe pas », en passant par Meunier tu dors, l’appli rassemble de tout, et pour cause : elle est participative, c’est à dire que chacun peut poster une chanson. La modération est récente, ce qui explique une partie des participations « sulfureuses », comme des chants utilisés par la Phalange nationaliste espagnole. 

Mais ne nous y trompons pas : la modération n’est qu’une part négligeable du problème. Tout tient dans l’objectif de l’application, qui compile entre autres sur un thème dont le seul nom pourrait faire s’évanouir les consommateurs réguliers du Café de flore : l’Histoire. La section « chants historiques » de Canto a l’insupportable caractéristique de rassembler non seulement des chants politiques, puisque l’histoire en est faite, mais plus inadmissible encore : des chants de tous bords. L’article de Libération cite par exemple Grün ist unser Fallschirmjäger, le chant des parachutistes de la Luftwaffe allemande écrit en 1941, et nous fait comprendre qu’un des fondateurs de l’appli assigné à l’extrême droite aurait pour but d’en promouvoir l’idéologie. Suivons le raisonnement : il promeut donc également L’Internationale communiste et Le chant des partisans. Drôle de partisan. Au vu du répertoire, les mêmes fondateurs seront d’ailleurs tour à tour royalistes et républicains, Français et Allemands, belliqueux et pacifistes. Tout un programme militant, en effet.

Peut-être nous trompons nous, et c’est bien Le Refuge de Edmond Duplan que le journal Libération (et alii) visait depuis le début. Cachez ce chant régional basque (factieux !) que l’on ne saurait entendre dans les rues de Paris. Tout ça, c’est d’extrême droite, et tout doit disparaître au profit des Inrocks, coqueluche de Libé qui, comme Canto certainement, « fleure bon la sauvegarde du patrimoine immatériel » (et non, ce n’est pas un compliment apparemment) mais sans la dimension politique que l’article prête à Canto, bien évidemment. Sinon, on ne trouverait pas 652 résultats d’articles au mot clef « Inrocks » sur le site du journal. 

Reste que ce lundi 17 avril au soir, il n’y avait « que la mafia et Projet CANTO pour faire chanter un chef d’État ! », lit-on en légende de la vidéo.

« Comment vous la connaissez cette chanson-là ? »
Bonne question du Président aux chanteurs intempestifs, qui lui proposent Le Refuge d’Edmond Duplan, une chanson qu’il apprécie grandement et chantait d’ailleurs cet été en marge de la 18e étape du Tour de France, coiffé d’un béret basque. Mais surtout, une chanson déjà ancienne, qui passerait pour vieillotte ou surannée, surtout si personne n’en transmet le goût. Et précisément, c’est l’objectif de l’application. « Comment vous connaissez cette chanson-là ? » Eh bien justement grâce au collectif, dont la mémoire vivante de telles chansons est l’objectif premier.

 « Je sais dans la montagne,
 Un refuge perdu
 Qui se mire dans l’eau claire
 Des lacs verts d’Orgélu
 Ouvert aux quatre vents
 Aux montagnards perdus
 Dans la brume et la neige
 Comme un port du salut,
 
 Qu’il fait bon s’endormir
 Au refuge le soir
 Près du feu qui s’éteint
 Au pays des isards
 
 Je sais dans la montagne,
 Un refuge perdu »
 
Le Président ne s’y est pas trompé ; ils chantent les chansons qu’il aime. Alors il chante aussi. Il n’y a que les journalistes neutres de Libé pour y voir une scène « sulfureuse ». Peut-être que chanter les Pyrénées, comme le fit Edmond Duplan et le font aujourd’hui les badauds d’un soir, est un symbole du Troisième Reich.

Enquête au point mort et pub gratuite
« Nous ouvrons une enquête afin d’envisager quelles mesures adopter, celles-ci pouvant aller jusqu’à l’annulation de l’aide en question » disait le Centre National de la Musique (CNM), interrogé par Libé. Le journal financé par Daniel Křetínský (Elle, Version Femina, Télé 7 jours, Marianne…) faisait tout un cas des 40 000 euros attribués au collectif pour développer son application. Depuis octobre, pas de nuage noir à l’horizon, puisque le soutien du ministère de la Culture reste sans faille. De quoi faire grincer certaines dents.

En attendant, l’objectif de l’association d’obtenir vingt mille suivis sur Instagram pour obtenir le soutien d’un fonds d’investissement risque de se réaliser plus tôt que prévu, grâce à une telle publicité médiatique (et involontaire).

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