AccueilGéopolitiqueGuerre en Ukraine : les impostures d’un volontaire américain chouchou des médias

Guerre en Ukraine : les impostures d’un volontaire américain chouchou des médias

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Qu’est devenu James Vasquez, le volontaire américain engagé depuis plus d’un an au côté des forces ukrainiennes ? Son récit est pris sous le feu critique des observateurs, dénonçant son imposture. Tout commence avec un thread publié mercredi 22 mars dernier sur Twitter par la journaliste américaine Sarah Ashton-Cirillo sur James Vasquez, parti combattre aux côtés des Ukrainiens dès mars 2022. « James Vasquez n’est pas et n’a jamais été dans la ZSU (Zbroini syly Ukrainy, les forces armées ukrainiennes) », écrit la journaliste.
 
Pour ceux qui s’intéressent de près au conflit, le nom n’est pas inconnu : ce vétéran de la guerre en Irak se montre particulièrement disert sur les réseaux sociaux à propos de son activité au front et n’hésite pas à solliciter sa communauté pour obtenir un soutien financier et matériel à sa cause. Il est d’ailleurs soupçonné de détournement de fonds, soupçon encore non confirmé à ce stade. Son compte Twitter, supprimé à la hâte juste après la publication du tweet de Sarah Ashton-Cirillo, comptait plus de 440 000 abonnés. Son dernier tweet ressemblait à un aveu alambiqué : « Je jette l’éponge. Toutes les personnes négatives ont gagné. Merci à tous ceux qui m’ont soutenu et qui ont soutenu l’Ukraine. Je suis un fantôme. »
 
Défaut de justificatif d’engagement
 
Sarah Ashton-Cirillo n’est pas n’importe quelle journaliste. Bien connue pour avoir changé de sexe en 2019, devenant une femme, l’américaine s’est fait remarquer en s’engageant comme secouriste dans l’armée ukrainienne au début du conflit. C’est à l’aune d’une connaissance pratique du terrain que la journaliste-secouriste accuse James Vasquez. Selon son témoignage, le volontaire n’est pas en mesure de « montrer ses papiers d’engagement dans ZSU », alors qu’il prétend en être.
 
Les contrats d’engagement dans l’armée ukrainienne répondent à un processus très strict et contrôlé, pour une durée d’au moins trois ans. Cela semble incompatible avec l’activité erratique de l’intéressé. Des contrats plus souples existent dans la Légion internationale, mais James Vasquez « n’était pas dans la Légion », rappelle Sarah Ashton-Cirillo. James était bien en Ukraine, non loin du front. Mais était-ce en tant que combattant ? Pour le lanceur d’alerte, la réponse est négative. Il précise avoir rencontré James Vasquez trois fois, toujours en tant que civil. « Il était choquant de le voir dire qu’il partait en mission à Soledar alors que nous en étions déjà partis », écrit-il.
 
7 chars russes détruits en un jour
 
James Vasquez fait partie des premiers volontaires américains à se faire connaître au début de la guerre. Il ne manque pas d’attirer l’attention des grands médias, qui en feront tout au long de l’année une source d’information de premier plan. Le Télégraph, CNN, le New York Post et bien d’autres ont régulièrement eu recours à son témoignage. Dernièrement, c’est le média Newsweek qui sortait un papier sur le premier anniversaire de la présence de James Vasquez sur le front. Mais jeudi, Newsweek a bien dû rapporter l’accusation de fraude, sans la confirmer pour autant. Dans ses interventions médiatiques comme dans les nombreuses vidéos partagées sur ses réseaux, le volontaire donnait la part belle à l’héroïsme de ses missions. C’est aussi à Newsweek qu’il avançait avoir détruit sept chars russes dans la même journée. Les photos qui circulent le montrent le plus souvent prenant la pose aux côtés des carcasses détruites de chars russes en tenue militaire ukrainienne impeccable, arme au poing.
 
L’homme avait jusqu’ici reçu aux États-Unis le soutien public d’Adam Kinzinger, un élu Républicain favorable à une intervention américaine directe en Ukraine et de Malcolm Nance, un vétéran lui-même revenu de 10 mois sur le front ukrainien. Ils ont fait part de leur déconvenue sur Twitter. Malcolm Nance partage en plus une vidéo où un homme – a priori James Vasquez – se fait rosser par un individu dans le métro aux États-Unis. On ignore la date de la vidéo, mais la prestation est relativement décevante pour un homme censé être rompu au combat au corps-à-corps.  

Un fact checking pas toujours au rendez-vous
 
Les soupçons qui pèsent sur James Vasquez nous rappellent que la vigilance des médias est parfois bien faible. On se souvient à cet égard de l’affaire du sniper canadien, surnommé Wali, dont les performances et le CV ont été gonflées par la presse, déclaré mort en héro à Marioupol, avant d’être ressuscité quelques jours après, loin de la ville. On pense également au « fantôme de Kiev », aviateur mythique des premiers temps de la guerre, à qui le gouvernement ukrainien prêtait des faits d’armes rocambolesques aux commandes de son MiG-29. On parle de 10 avions russes abattus en un jour. Une histoire créée de toutes pièces mais de manière parfaitement assumée : l’Ukraine a besoin de héros.
 
Dans le conflit de haute intensité tel qu’on le voit depuis l’invasion russe, la recherche et la confrontation de l’information est un défi immense au rendez-vous duquel les médias occidentaux ne savent toujours répondre présent. La guerre de l’information étant l’un des corollaires majeurs du conflit, il convient de traiter avec précaution les renseignements donnés par chaque partie. Une posture prudente que le lieutenant-colonel Anatoliy Kozel, officier ukrainien, n’a pas su adopter lorsqu’il a fait part de la situation difficile de son unité et l’armée ukrainienne à la presse. Il a été retiré du front et rétrogradé, selon Le Figaro.

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