Pedro Castillo, en annonçant la dissolution du Congrès péruvien et en décrétant l’état d’urgence, a accéléré sa chute. Une chute qui, en réalité, était déjà amorcée du fait des deux précédentes tentatives du Congrès de le destituer. C’est en sentant la fin que l’ex-président a réagi en annonçant cette dissolution et en décrétant l’état d’urgence. Un échec illustré par la décision du congrès de le destituer pour « incapacité morale ».
Un début de mandat déjà marqué par des scandales de corruption
Cette destitution s’inscrit dans un contexte politiquement instable, qui n’a pas épargné le court mandat de Pedro Castillo. Syndicaliste issu du milieu paysan, Pedro Castillo se présente en 2021 comme candidat à l’élection présidentielle pour le parti Perú Libre. Un parti marxiste-léniniste associé à des positions de gauches radicales.
Les résultats contestés de l’élection de juillet 2021 laissaient déjà entrevoir un mandat compliqué. Pedro Castillo était parvenu à s’imposer au second tour avec 50,1 % des suffrages face à sa rivale Keiko Fujimori. Cette dernière, battue pour la troisième fois au second tour, conteste les résultats.
Elle exerce par la suite des recours successifs entrainant alors un recomptage des votes de six semaines. La fille de l’ancien président Alberto Fujimori reconnait finalement sa défaite face au candidat de gauche radicale au terme de longues semaines de contestation.
Un autre scandale majeur est révélé cette fois-ci concernant Vladimir Cerrón, l’homme qui a permis à Pedro Castillo d’accéder à la présidence. Accusé de corruption, le leader de Perú Libre (parti radicale de gauche dont est issu Pedro Castillo), a été interdit d’exercer toute fonction publique. Une condamnation contraignant alors Pedro Castillo à rompre tout lien avec celui-ci. Des complications qui se retranscrivent aussi dans la difficulté à maintenir un gouvernement en place ; cinq gouvernements ont été formés en moins d’un an et demi, comme le précise Courrier international.
Le 7 décembre 2022, la destitution de Pedro Castillo s’accompagne de son arrestation et de sa mise en détention pour rébellion et conspiration ; sa tentative de refuge politique à l’ambassade du Mexique ayant là encore échoué.
Une succession compliquée
Pour occuper la place désormais vacante de la présidence, la vice-présidente Dina Boluarte a été investie, devenant ainsi la première femme à occuper cette fonction. Mais sa désignation ne suffit pas à résoudre les problèmes qui gangrènent le pays et la crise politique devient l’illustration de la crise sociale déjà bien installée.
Un rapport de force s’installe alors entre la nouvelle présidente et la population qui exprime sa colère au travers de blocages et de manifestations. Des mouvements tels, que l’état d’urgence a été décrété dans tout le pays pour une période de trente jours.
Parmi les revendications des manifestants : la dissolution du Congrès, la libération de Pedro Castillo, la démission de Dina Boluarte ou encore l’organisation d’élections générales. Pour tenter de calmer les protestations, la nouvelle présidente a fait connaitre sa volonté d’organiser des élections anticipées. Celle-ci essaye aussi d’apaiser la situation politique et d’améliorer les rapports entre pouvoirs exécutif et législatif. Ce qui s’est traduit notamment par une rencontre avec les représentants des différents groupes parlementaires, qualifiée de « geste de dialogue et de main tendue » par Le Monde.
Malgré ces efforts, la situation ne s’améliore pas et les manifestations s’intensifient dans un contexte politiquement instable. Pour l’instant, le bilan de la sévère répression des autorités s’élève à sept morts et des centaines de blessés, mais l’incapacité de l’exécutif à répondre aux revendications des manifestants n’exclut pas une intensification des mesures restrictives.