Lorsqu’éclatent en janvier 2011 ce que l’on nommera communément les « printemps arabes », le Maroc est déjà engagé dans les travaux préparatoires d’une réforme constitutionnelle souhaitée par le roi Mohammed VI, désireux depuis son accession au trône de moderniser les institutions de son pays forgées par son père Hassan II et son grand-père Mohammed V, eux mêmes héritiers d’une longue lignée de sultans et d’une tradition étatique pluricentenaire.
Des manifestations éclatent le 20 février 2011 mais dès le 9 mars, le roi du Maroc annonce l’imminence d’une nouvelle constitution, plus libérale, qui sera soumise à référendum le 1er juillet suivant et adopté à une très forte majorité. Souvent autorisées, mais parfois interdites, les manifestations se poursuivront jusqu’à la fin du printemps dans plusieurs villes marocaines. Des altercations opposeront parfois partisans et adversaires de la monarchie.
Libéralisation
La nouvelle constitution marocaine promulguée le 29 juillet 2011 conforte la monarchie traditionnelle et héréditaire, le vote des lois étant confié à un parlement bicaméral dont le parti arrivé en tête détermine la couleur politique du Premier ministre choisi par le Roi. Le gouvernement doit faire l’objet d’un vote d’investiture par la chambre des représentants (chambre basse) élue au suffrage universel. Il est vrai cependant que le gouvernement ne peut faire l’objet d’une motion de censure, critère d’existence du régime parlementaire.
On fera néanmoins remarquer qu’une seule motion de censure a été voté en France depuis la fondation de la Ve République en 1958 (en 1962 après l’indépendance algérienne), et que la Monarchie de Juillet du roi Louis-Philippe – assez proche du système institutionnel marocain contemporain – constitue de l’avis de certains historiens, la seule vraie parenthèse libérale en France date justement de la période 1830-1848 (Jean-Baptiste Noé, La parenthèse libérale, Calmann-Lévy, 2018).
Décentralisation
L’une des grandes réformes permises par cette nouvelle constitution marocaine de 2011 est la réalisation d’une profonde décentralisation, débouchant sur une régionalisation du pays. Cette décentralisation est aussi, pour la monarchie marocaine, un moyen de mieux intégrer et développer les provinces du sud, aussi appelées Sahara occidental, visées depuis 2007 par un plan d’autonomie présenté en 2007 à l’ONU par le Maroc pour achever le processus de normalisation de cette zone jadis visée par la rébellion du Polisario, soutenue par le voisin algérien.
La nouvelle chambre des députés, issue des élections du 25 novembre 2011, placera le PJD islamiste en tête avec 107 sièges sur 395. Le PJD dominera la vie parlementaire marocaine pendant dix ans avant de s’effondrer lors des élections législatives de 2021, refermant la parenthèse ouverte suite aux printemps arabes.